QD & Moi – AURÉLIEN BAGUERRE – LEAD AUDIO
Quantic Dream : Peux-tu te présenter ? Quel est ton nom, d’où viens-tu et quel est ton rôle chez Quantic Dream ?
Bonjour, je m’appelle Aurélien Baguerre, Je suis Lead Audio chez Quantic Dream. Je suis natif de l’est de la France, mais j’ai vécu 20 ans dans le sud et huit ans au Canada. Je m’occupe donc de tout ce qui touche au son dans nos projets.
QD : Comment t’es-tu retrouvé à travailler dans l’industrie du jeu vidéo ? Était-ce un rêve de longue date, ou l’as-tu intégré un peu par hasard ?
Je suis vraiment tombé par hasard dans le jeu vidéo, c’était il y a une vingtaine d’années, je travaillais à l’époque dans l’industrie musicale et par le biais de connaissance on m’a proposé de travailler sur un jeu vidéo pour Ubisoft, Beyond Good & Evil. C’était archaïque, tout était embryonnaire, la technologie audionumérique n’en était qu’à ses débuts. Le métier de Sound Designer était très méconnu et on était peu nombreux, il fallait être très créatif, jusque dans nos processus et méthodes, car tout était long et fastidieux. Depuis, je n’ai plus quitté l’industrie du jeu vidéo et j’ai pu voir mon métier et les outils évoluer et se transformer, c’est assez passionnant.
QD: Parle-nous plus précisément de ton travail ici ; quel est ton rôle et celui de ton équipe ?
Mon rôle consiste à m’assurer que la production sonore et la post-production se passent bien durant nos projets, c’est un mandat assez large qui touche aussi bien aux bruitages, le mixage, les infrastructures software ou hardware, que de briefer et échanger avec les compositeurs, etc. C’est bien sûr un travail d’équipe, chacun a ses forces dans un domaine ou un autre, ce qui fait qu’on se complète très bien. Il y a aussi tout l’aspect des tournages motion capture dont nous prenons en charge la capture sonore en direct. À mon arrivée à Quantic Dream en 2015, j’avais déjà travaillé sur plusieurs opus d’Assassin’s Creed ou autres projets en « monde ouvert », où l’approche et le travail sonore sont plus « systémiques », tandis que sur Detroit: Become Human, chaque action ou animation est scenarisée et realisée en motion capture par des acteurs, ce qui implique que chaque son est quasiment unique, avec un placement bien précis. C’est, de mon point de vue, une approche artisanale du design sonore où il est plus difficile de rapidement créer des multiples versions pour un même effet sonore.
QD: Dis-nous en plus sur les membres de ton équipe. Tu as quelques anecdotes en mémoire ?
Nous sommes 3 actuellement dans l’équipe : je travaille avec deux sound designers (Alexis et Xavier), mais durant les périodes de production plus exigeantes, l’équipe peut être amenée à s’agrandir temporairement, si nécessaire, comme sur Detroit: Become Human où nous étions sept pour le projet.
QD: Peux-tu nous décrire ta journée type ? Est-ce que ça existe pour toi ?
Il n’y a pas vraiment de journée type, on peut aussi bien faire des sessions de bruitage que de la prise de son sur le plateau de motion capture, du mixage ou de la documentation technique, de l’installation de matériel. Ou encore, assister à des enregistrements pour la musique en studio. C’est vraiment très différent chaque jour, c’est ce qui est intéressant, il n’y a pas ou très peu de routine dans notre métier.
QD: Certaines de tes inspirations extérieures se reflètent-elles dans ton travail ?
Je pense que oui, peut-être même sans que cela soit conscient de ma part ; je m’inspire beaucoup du cinéma dans mon travail, ses méthodes, certains choix artistiques pour le mixage, parfois volontairement en m’inspirant vraiment de ce que j’entends dans un film et parfois inconsciemment. Je peux par exemple appliquer certaines techniques de mixage entendues ou remarquées dans un film à mon travail. Certains films d’Edward Zwick, comme Glory et Le Dernier Samouraï, m’ont marqué par leurs approches sonores et musicales, ou encore Guillermo Del Toro pour ses univers fantastiques. Je suis aussi fan des films de M. Night Shyamalan, notamment La jeune fille de l’eau, que je trouve très poétique, avec une bande son incroyable de James Newton Howard, que j’admire beaucoup. Coté sound design, je suis bien sûr un grand fan de Ben Burt (Star Wars, Wall-E, Jurassic Parc…), qui reste un des grands pionniers du domaine ! Les films de Steven Spielberg aussi, comme Il Faut Sauver le Soldat Ryan, ou Super 8 de J.J. Abrams, sont de très bonnes références sonores.
QD: Voici une grande question… Quels sont tes jeux préférés ?
Difficile de répondre précisément à cette question ; je peux aimer la bande-son ou le traitement visuel d’un jeu sans pour autant être fan du gameplay, mais j’ai quelques jeux qui m’ont marqué. Des jeux un peu anciens comme Myst et ICO, des jeux plus récents comme la série Uncharted ou encore Unravel 1 & 2 que je trouve très poétiques.
QD : Dis-nous en plus sur tes centres d’intérêt en dehors du travail.
Je suis passionné d’astrophotographie. Je pratique l’observation astronomique depuis mon adolescence et je suis passé à l’astrophoto il y a quelques années. C’est très prenant, on passe des nuits à photographier et pas mal de soirées à retravailler les images. Depuis quelques temps j’utilise la technologie de Remote Imaging qui me permet de contrôler à distance un télescope au Chili ou en Espagne, pour pratiquer l’astrophoto dans de meilleures conditions, sans pollution lumineuse ni météo capricieuse. Cela me permet aussi d’avoir accès à du matériel professionnel et très bien réglé pour faire de la photo de ciel profond, notamment d’objets lointains difficilement accessibles avec du matériel « plus abordable ». Voici d’ailleurs deux de mes clichés : la nébuleuse de la rosette et la nébuleuse de l’aigle faites en remote imaging depuis un télescope au Chili.
QD: À quoi ressemble ton vendredi soir idéal ?
Apéro et barbecue dans le jardin avec les enfants et soirée observation du ciel !
QD: As-tu un message pour nos lecteurs ?
Ne coupez pas le son quand vous jouez ! (svp ^^)
QD : Dernière question ! Gâteau au chocolat ou tarte aux fruits ?
Plutôt tarte aux fruits mais je reprendrais bien un peu de gâteau au chocolat s’il en reste…